LES CÉRÉALIERS FRANÇAIS APPELLENT LA FRANCE À INTÉGRER LA GÉOPOLITIQUE DU BLÉ DANS SON ACTION INTERNATIONALE

 Fragilisés par une année atypique marquée par un effet ciseaux dévastateur, les céréaliers français sont progressivement confrontés à un profond changement de paradigme du commerce international. Une nouvelle géopolitique du blé qui s’avère déterminante, tant pour la paix alimentaire que pour la compétitivité des exploitations françaises qui y contribuent. Pour soutenir une filière stratégique pour la France, l’AGPB appelle l’Etat français à faire preuve de courage et de pragmatisme.

 

Un effet ciseau potentiellement dévastateur pour de nombreux céréaliers français

L’année 2023 est marquée par une chute vertigineuse des cours mondiaux conjuguée à une explosion des coûts de production. En effet, en un an, le cours du blé a baissé de près de 200€/t passant de 410€/t à 225 €/ t à fin mai 2023 (source Euronext).

Dans le même temps, les céréaliers subissent des hausses charges de plus de 37% par rapport à la moyenne d’avant – guerre 2018-2021. Le coût des engrais, particulièrement éloquent car il s’agit du premier poste responsable de cette hausse, a bondi de 120 € /t par rapport à 2022. Les cours actuels ne permettront donc pas de couvrir les coûts de production, créant un effet ciseaux potentiellement dévastateur pour de nombreuses exploitations.

 

Une nouvelle donne internationale qui déséquilibre les marchés et menace la paix

Une situation économique inquiétante alimentée et accentuée par les conséquences de la guerre en Ukraine, l’interventionnisme russe en Afrique et l’élargissement de l’alliance des BRICS bouleversent les fondamentaux du marché et présagent d’une recomposition totale du commerce international.

Avec une récolte estimée à 89,6 Mt pour la prochaine campagne 2023-2024, qui serait la 2ème meilleure de son histoire, la Russie confirme sa volonté de faire du blé une arme de diplomatie massive. Sur la campagne 2022-23 elle a exporté pas moins de 48,1 Mt en se déjouant des marchés classiques pour assoir son influence auprès des pays tiers. Un blé bradé qui a remporté tous les premiers appels d’offres des pays tiers face à un blé français mécaniquement moins compétitif.

Une situation qui a pour corollaire de remettre en question la fonction des marchés internationaux, puisque la construction des prix commence à échapper à la réalité des fondamentaux du marché.

Ces composantes nécessitent, tant au niveau français qu’européen, la construction de solutions justes et protectrices pour tous, et des investissements à la hauteur des enjeux en présence.

Pour Eric Thirouin, Président de l’AGPB « Pour la première fois depuis 30 ans, nous assistons clairement à un changement de paradigme économique très profond qui va bien au-delà de la seule guerre en Ukraine. Les cartes économiques et géopolitiques sont rebattues. Je lance aujourd’hui un appel solennel à l’Etat français pour qu’il refonde sa politique pour soutenir la stabilité politique et économique à l’international. Avec l’ensemble de la filière, nous devons nous emparer de ce sujet et anticiper les solutions pour réussir avec ces nouvelles règles du jeu ».

 

Soutenir une filière stratégique pour répondre aux défis géopolitiques, économique et climatique

Les enjeux géopolitique, économique et climatiques sont intimement liés. Pour être en mesure de relever les défis internationaux, il faut être compétitifs au niveau national. Cela nécessite d’avoir une visibilité et une cohérence des politiques agricoles menées en France.

Eric Thirouin précise les attentes des céréaliers : « Du réchauffement climatique au refroidissement des coopérations internationales, c’est notre souveraineté agricole et notre capacité à nourrir la planète qui se jouent. Pour réussir les transitions et continuer à peser dans le concert des nations, il faut s’en donner véritablement les moyens ! L’Etat se doit de conjuguer l’ambition du cap fixé et les justes moyens à allouer. Nous demandons de la visibilité et de la cohérence dans les politiques agricoles pour nous permettre de soutenir notre compétitivité »